Vie dans les champs : le parcours inspirant de l’agronome Christian Travailleur

Article publié dans le Défi Plus du samedi 7 octobre 2023

Ce samedi, découvrons le récit captivant de Christian Travailleur, une figure emblématique du monde agricole mauricien. Son parcours professionnel et son engagement envers les petits planteurs font une véritable différence.

 

Dans le vaste domaine de l’agriculture, l’apport précieux des agronomes ne saurait être sous-estimé. Saviez-vous que ces experts jouent un rôle crucial dans la conception et la mise en œuvre de stratégies agricoles innovantes, contribuant ainsi à l’efficacité et à la durabilité des exploitations ? À travers l’exemple de Christian Travailleur, Head of Alteo Planters’ Services (APS), nous faisons une incursion au sein de cette profession essentielle. Son parcours illustre à merveille la valeur inestimable que les agronomes apportent à l’industrie agricole, notamment dans le contexte spécifique de la culture de la canne à sucre à Maurice.
Christian Travailleur « inn pran naissans dan Por Lwi Ward 4 » en 1964. Par la suite, sa famille part s’installer dans le district de Plaines Wilhems. Après « ti-lekol Miss Ginette », il intègre l’école primaire de renom, Philippe Rivalland RCA, à Beau-Bassin et fait ses études secondaires au prestigieux Collège Saint-Esprit, à Quatre-Bornes. Tout de suite après, il se lance dans l’enseignement, ce qui va lui servir de tremplin pour sa carrière professionnelle.
Après une année en tant qu’enseignant, il intègre l’Institut de Recherches Sucrières (MSIRI), où il exercera pendant 23 ans. Durant cette période, il obtient un diplôme en Crop Science and Production), ainsi qu’une maitrise en Agricultural Extension. « Je dois beaucoup au MSIRI et aux ainés qui m’ont inculqué la rigueur scientifique et qui m’ont donné beaucoup sur le plan professionnel et personnel. J’ai toujours un pincement au cœur quand je passe voir mes amis », confie notre interlocuteur. Ce dernier rejoint ensuite la société FUEL Sugar Milling Company Limited (FSMC) en 2010, devenue aujourd’hui, Alteo Milling Ltd. Quelques années plus tard, il obtient une maitrise en gestion.

Le choix de carrière : l’agriculture

Avec plus de 35 années d’expérience dans le domaine de l’agriculture, Christian Travailleur avoue que son cheminement s’est fait tant par choix que par les opportunités qui se sont présentées à lui. Il mentionne que ce qui l’a particulièrement séduit dans la recherche agricole, c’est la rigueur requise par son approche scientifique. « Elle consiste à célébrer les résultats positifs probants et à accepter les résultats négatifs. Ils sont une source de réflexion additionnelle et souvent, le début d’un autre cycle de recherche », indique-t-il.
L’agronome nous confie que c’est également le conseil agricole qui lui a permis d’exercer la science et l’art de la communication : « C’est ce qui a facilité ma capacité à rester attentif à la communauté des petits planteurs pour laquelle j’éprouve une admiration incommensurable et un profond respect ».

La source de motivation
Christian Travailleur précise qu’il puise sa motivation dans l’idée que son engagement sans réserve contribue à l’épanouissement de ce qu’il soutient. « J’aime les défis. Alors, quand j’ai été approché par la société FUEL en 2010, c’est cet aspect qui a fait pencher la balance », indique-t-il. En ce qui concerne ses premières responsabilités, il explique qu’à son arrivée dans l’équipe de FSCM en 2010, le projet de replantation des terres des petits planteurs de canne à sucre était en pleine effervescence dans le contexte de la restructuration de l’industrie sucrière de l’île. « Ma première tâche fut de mener à bien la revégétalisation, tout en s’assurant que le cahier des charges du projet soit respecté », dit-il.
Et maintenant ? « Très vite, nous avons compris que la replantation ne suffisait pas et qu’il fallait accompagner les petits planteurs tout le long du cycle de la culture de la canne. C’est ainsi que prit forme la panoplie des prestations pour lesquels le service planteurs d’Alteo est aujourd’hui connu », explique notre interlocuteur. Ce dernier indique que ces prestations incluent la récolte de la canne et des activités ponctuelles telles que la plantation, la fertilisation des champs et l’application des herbicides, entre autres. Selon lui, ces services n’auraient pas vu le jour et connu le succès qui a suivi sans le soutien indéfectible des personnes comme Jean-Luc Harel (ex-COO du cluster industriel), Joseph Vaudin (ancien CEO de FUEL) et Christian Marot (ex-COO du cluster Agriculture), ainsi que leurs successeurs.

Le principe de Total Management

Nous apprenons de Christian Travailleur qu’à la suite de la fusion entre FUEL et Deep River Beau-Champ Sugar Estate, le service planteurs qui couvrait les factory areas de FUEL, Mon Désert Alma et Highlands, prend de l’ampleur et s’étend graduellement à celles (factory areas) de Beau-Champ et Constance. Une des autres retombées significatives de cette fusion, selon lui, est que le modèle de service de gestion totale des champs de planteurs, souvent appelé Total Management Service, qui avait débuté à Beau-Champ, a été répliqué dans d’autres régions d’Alteo. « A l’époque, une superficie d’environ 200 hectares était sous Total Management. Notre objectif est d’augmenter la superficie des terres des planteurs que nous gérons d’au moins deux à trois fois d’ici deux ans », explique-t-il.
Christian Travailleur tire pleinement profit de ses études en agronomie, conseil agricole et en gestion, notamment dans la formulation des stratégies à développer. C’est surtout vrai quand il s’agit d’adapter les services afin de faire face aux besoins des planteurs qui ne cessent d’évoluer dans l’implémentation de celles-ci pour que les prestations soient à la mesure des attentes des clients. Mais plus encore, maintenant que les services répondent à certains standards de qualité.
Quid de ses contributions spécifiques? « J’ai expliqué aux initiateurs du projet Domaine Vuillemin dans quelle mesure les compétences de mon équipe à travers le Total Management peuvent aider les futurs propriétaires à s’assurer que leurs terrains demeurent bien entretenus en optant pour la culture de la canne à sucre », explique-t-il. Selon l’agronome, un contrat de gestion permet au propriétaire de se libérer de toute préoccupation concernant les activités de production de la canne à sucre.« Nous considérons que c’est une solution bénéfique pour toutes les parties impliquées, avec l’usine Alteo qui garantit un approvisionnement en canne à sucre et les propriétaires qui réaliseront un petit profit », ajoute-t-il.

Expertise en sciences et production des cultures

Comment votre expertise en sciences et production des cultures bénéficiera-t-elle aux acheteurs des parcelles du Domaine Vuillemin ? « Cette expertise se traduira en une gestion raisonnée des terres selon les normes de bonnes pratiques de l’industrie cannière. Ainsi, la production de la canne sera optimisée, sans pour autant avoir un effet néfaste sur l’environnement », affirme-t-il.
À travers l’automatisation de certains systèmes clés, c’est grâce à sa solide connaissance des outils informatiques que Christian Travailleur rationalise la gestion des informations du département de services aux planteurs. Ainsi, ses collègues et lui peuvent maintenant consacrer plus de temps aux opérations qui demeurent l’essence du service aux planteurs. « J’ai su convaincre mes collègues que ce qui fait la différence entre Alteo Planter’s Services et d’autres pourvoyeurs de service, c’est la qualité de notre prestation, incluant notre accueil, notre écoute, la qualité des prestations et le suivi », dit-il.
D’après lui, l’APS ne se limite pas à fournir des services aux planteurs, mais offre également gratuitement des conseils agronomiques et techniques à ces derniers. Plus récemment, renchérit-il, suite à une demande, TAPS a commencé à dispenser des formations relatives surtout aux besoins du fairtrade. « Nous valorisons particulièrement notre collaboration étroite avec les acteurs clés du secteur. Ce sont notamment la Mauritius Cane Industry Authority (MCIA), le MSIRI, la Farmer’s Service Agency, les coopératives et les associations des petits planteurs, la Chambre d’Agriculture et les prestataires de service (contracteurs) pour la main-d’oeuvre, le chargement et le transport de la canne, entre autres », fait-il ressortir.

Chaque planteur compte

Christian Travailleur ajoute: «Je dirais que j’ai su tirer avantage de mon expérience dans le domaine agronomique ainsi que dans celui du conseil relatif à l’agriculture et y ajouter le volet du service agricole ». Toutefois, ce qui le distingue, c’est aussi et surtout, cette approche empathique qui caractérise son style bien à lui. Pour lui et l’équipe d’APS, chaque planteur compte, qu’il soit propriétaire de quelques perches ou de plusieurs hectares ou qu’il soit un métayer. En tant que responsable du service planteurs, l’agronome sait que l’action d’APS n’existe que par la synergie qui émane d’une équipe soudée.
Son équipe est composée des Operations Managers, Gilles Fabre et Karl Lareine, du Technical and Administrative Officer, Dhiraj Akalooa, du Office Messenger, Deep Bhato et les Field Supervisors, Pierre Grossiérenez, Yvon Manuel, Imran Subratty et Vivek Ramkalawon. Au quotidien, il inspire ses collaborateurs, tant par son attachement à la communauté des petits, que par sa connaissance découlant de son expérience et de ses intérêts. L’agronome guide ainsi toute son équipe en les aidant à s’aligner sur une vision qui permet d’avoir une ligne directrice pour la réalisation des objectifs définis de façon collégiale. La modestie et la force tranquille l’aident aussi dans son rôle.

« Making the East an everlasting place to grow »

En tant qu’acteur clé de la région est du pays, Alteo souhaite créer de la valeur ainsi que des opportunités de croissance durables grâce à ses activités et autres projets innovants en ligne avec sa vision de «Making the East an everlasting place to grow». Pour rendre plus accessibles les terrains agricoles, tout en contribuant à l’autosuffisance alimentaire de Maurice, le groupe Alteo vient de mettre 86 lopins de terre agricole Vuillemin Estate en vente, depuis le 1er septembre.
Situés à quelques minutes de Quartier-Militaire, plus précisément à Melrose, ces lopins de terre, qui varient entre 50 et 100 perches, sont accessibles à tout le monde. En ce sens, en achetant un terrain à Vuillemin Estate, l’acquéreur pourra également bénéficier du soutien d’Alteo à travers l’APS. « Nous offrons une solution clé en main avec la gestion intégrale de la canne à sucre sur le terrain, notamment d’une possible plantation jusqu’à la récolte en passant par l’entretien général de la culture », affirme Christian Travailleur.
Notre interlocuteur ajoute que pour ceux qui souhaitent cultiver d’autres légumes ou fruits, l’un des agronomes d’Alteo, Junior Contato, Farm and Productive Landscape Manager, a déjà identifié une sélection de produits adaptée à la région. Ce sont les tomates, les bananes, les giraumons ou encore les ananas. Dans la pratique, notre interlocuteur indique que son apport est intéressant, car il est possible d’expliquer aux futurs acquéreurs, en des termes simples, les implications de devenir planteurs de canne à scure. Certes, on peut trouver des informations importantes sur une brochure, toutefois celle-ci ne répond pas aux questions.

 

Comme tout gestionnaire, le petit planteur doit évaluer les risques
Ne dites jamais à Christian Travailleur que les planteurs n’aiment pas adopter les nouvelles technologies parce qu’ils sont attachés à certaines « traditions ». Ce serait une erreur ! Vous aurez droit à: « Eoula mo kamarad, ki ou ape koze-la?» Cependant, si vous le faites, ce sera une occasion pour l’agronome de vous expliquer que ce « value judgement » reflète une méconnaissance de la personne qu’est un petit planteur. Vous risqueriez une remontrance pour ce qu’il appelle une légèreté d’expression qui masque une ignorance profonde des réalités du système de production et de la résilience innée des petits planteurs.
Finalement, vous comprendrez que, comme tout gestionnaire sensé, le petit planteur doit évaluer certains risques avant de prendre des décisions. Par exemple, le choix de planter une nouvelle variété de canne à sucre est-il bien fondé ? Dans le passé, c’est la connaissance de ces réalités qui a permis à l’agronome d’éviter que des planteurs ne prennent des décisions qui auraient pu mener à une catastrophe.
En résumé, le parcours de Christian Travailleur, marqué par sa passion et son expertise, souligne l’importance cruciale des agronomes dans le secteur agricole. Son dévouement envers les petits planteurs et sa contribution remarquable à l’essor de l’industrie sucrière à Maurice ne sont que des exemples, parmi tant d’autres, de l’impact positif que ces professionnels apportent pour assurer la pérennité et la prospérité de notre agriculture, aujourd’hui et pour les générations à venir.

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